La légende de Pachacamac nest pas prête de séteindre. Dabord, des chroniqueurs hispaniques du XVIe siècle ont prétendu quHernando Pizarro avait détruit lidole du dieu lors de sa conquête de lempire Inca dans les Andes. Puis, un mât en bois sculpté représentant Pachacamac a finalement été découvert sur le site archéologique du même nom en 1938, laissant penser que les Espagnols sétaient trompés ou que la destruction de lidole navait pas été complète. Reste quun nouveau mystère était apparu : quelle est la nature des colorations rouges observées sur lobjet ? Du sang, reste de pratiques sacrificielles ?
Grâce à une collaboration étroite avec le musée du site archéologique de Pachacamac (Pérou), une équipe de recherche internationale1 a pu mener des premières analyses inédites, non invasives et non destructives, de la polychromie de lidole. Celles-ci ont tout dabord révélé que le rouge nest pas la seule couleur présente sur la pièce de bois : on trouve du blanc sur les dents dun personnage et du jaune sur certaines coiffes.
Plus intéressant encore, les chercheuses et chercheurs ont pu déterminer la composition chimique des pigments et montrer que le rouge nest pas du sang mais du mercure, sans doute issu de cinabre, un minerai de mercure connu depuis plus de 2.000 ans dans la région. Or, les sources de cinabres des Andes se trouvent à près de 400 km de Pachacamac, en altitude. Lidole a donc bien été peinte avec une intention, sans doute celle de montrer un pouvoir économique et politique en acheminant un pigment dune région lointaine alors que dautres étaient disponibles sur place.
Enfin, lidole de Pachacamac a été datée au carbone 14 pour la première fois. Lobjet a été façonné aux alentours de 731 après JC, probablement par les Waris, soit environ 700 ans avant lapogée de lempire Inca. Cela confirme que le site de Pachacamac avait déjà une importance rituelle locale avant larrivée des Incas, qui en feront par la suite lun de leurs principaux centres de pèlerinage, au point dabriter un oracle conseillant lempereur lui-même.
Ces résultats sinscrivent dans une large étude des objets et murs peints du site archéologique de Pachacamac visant à mieux comprendre les matériaux, pratiques et connaissances liés à la couleur dans les Andes, au cours de la période préhispanique.
*- En France, ont participé des scientifiques du Laboratoire d'archéologie moléculaire et structurale (Lams - CNRS/Sorbonne Université), du laboratoire "Archéologie des Amériques" (Archam - CNRS/université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), du laboratoire "Histoire naturelle de l'Homme préhistorique" (CNRS/Muséum national d'Histoire naturelle / Université de Perpignan - Via Domitia) et du Musée du quai Branly - Jacques Chirac.
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Journal
PLOS ONE