Dans les maladies auto-immunes, le système immunitaire se trompe d « ennemi » et produit des anticorps qui sattaquent aux propres cellules du patient. Lune dentre elles, le syndrome des anticorps anti-phospholipides (SAPL), est encore mal connue, bien que pouvant avoir des conséquences dramatiques. Elle est due à laction danticorps dirigés contre une protéine qui circulent dans le plasma sanguin et induisent une tendance accrue du sang à former des caillots. Il peut en résulter différents accidents vasculaires tels que des thromboses veineuses ou des accidents vasculaires cérébraux, mais aussi des fausses-couches à répétition. La prévalence du SAPL est très difficile à évaluer mais elle se situerait autour de 0,5% de la population générale. Son diagnostic est compliqué : le test utilisé actuellement présente certains problèmes de variabilité, de spécificité et de sensibilité. Cela est sur le point de changer: des chercheurs de lUniversité de Genève (UNIGE) et des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) sont parvenus à identifier lendroit exact où les anticorps anti-phospholipidiques se fixent, permettant le développement dun test diagnostique beaucoup plus précis et standardisé. Un progrès indéniable pour les patients. Ces résultats sont à lire dans la revue Haematologica.
Chez les personnes souffrant de SAPL, certains anticorps, les anti-Β2GP1, sattachent à des éléments que lon trouve à la surface des cellules, et en particulier celles des vaisseaux sanguins et du placenta. En se liant à des récepteurs situés sur la membrane cellulaire, ils génèrent un signal menant à la production de facteurs pro-inflammatoires et pro-thrombotiques à lorigine des accidents vasculaires. En identifiant lendroit exact où ces anticorps interviennent, les chercheurs de lUNIGE et des HUG ont pu élucider leur mode de fonctionnement. Karim Brandt, chercheur à la Faculté de médecine de lUNIGE, explique limportance de cette découverte : « Les tests diagnostiques actuels de cette maladie utilisent lentièreté de la protéine, diminuant ainsi la spécificité, et présentent un problème de standardisation. Il faut donc effectuer deux tests à 12 semaines dintervalles après un épisode thrombotique ou après une ou plusieurs fausses couches. Notre nouveau test permet de cibler spécifiquement cet anticorps pathogène et davoir des résultats plus précis rapidement. »
Un anticorps au comportement un peu particulier
Les chercheurs sont parvenus à isoler ce quon appelle un motif une petite partie de la protéine membranaire concernée - qui est reconnu par lanticorps qui vient alors sy lier, un peu sur le principe dune clé et dune serrure. Dans le cas présent, la clé peut ouvrir plusieurs serrures, lesquelles correspondent aux protéines présentent à la surface des cellules et induisant les effets pathogènes. Et si la protéine cible a été identifiée comme telle, cest parce quelle est la seule dans tout le protéome humain à présenter cinq de ces motifs. Elle présente ainsi autant de points de liaisons possibles pour lanticorps pathogène.
Mieux diagnostiquer, mais aussi mieux traiter
La SAPL est habituellement traitée avec des anticoagulants oraux tels que lhéparine à bas poids moléculaire et laspirine, des traitements à prendre sur le long terme et non dénués deffets secondaires, toujours délicats chez les femmes enceintes. Les traitements savèrent de plus très lourds chez les patients souffrant de la forme la plus sévère de la maladie, le SAPL catastrophique. Cest également dans cette direction que les chercheurs travaillent, comme le souligne Karim Brandt: « Notre découverte pourrait aussi donner le jour à un traitement ciblé qui consisterait à neutraliser spécifiquement les anticorps pathogènes, diminuant ainsi leurs actions, mais également les effets secondaires associés aux traitements. Il sagirait dinjecter dans le système circulatoire des patients le motif protéique particulier que nous avons identifié, afin quil se fixe spécifiquement sur lanticorps pathogène pour lempêcher de nuire. »
Pour lheure, le test diagnostic doit être optimisé afin de développer des prototypes. Pour assurer sa validité, les chercheurs vont tester à nouveau des centaines échantillons déjà testés avec lancienne méthode, afin de comparer les résultats obtenus.
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Journal
Haematologica