Il y a 200 millions dannées, à la limite entre le Trias et le Jurassique, environ 60% des espèces présentes sur Terre ont disparu. On soupçonnait déjà lactivité volcanique et ses rejets de CO2 dêtre à lorigine de cette catastrophe environnementale. Encore fallait-il, pour sen assurer, trouver puis dater avec précision les traces de cette activité et sassurer quelles coïncidaient avec la période de cette extinction de masse. Cest le tour de force quont réalisé des chercheurs de lUniversité de Genève (UNIGE), qui publient les résultats de leur datation dans Nature Communications.
Les scientifiques ont rapidement attribué lanéantissement observé aux rejets de gaz dus à une activité volcanique intense dans de vastes régions, les grandes provinces ignées, identifiées par des coulées de basaltes. Mais une datation fine est venue infirmer cette hypothèse: ces couches étaient trop jeunes pour être responsables de lextinction de masse. Les scientifiques, dont une équipe de lUNIGE, se sont alors mis à la recherche de traces magmatiques plus anciennes, qui prouveraient le rôle joué par lactivité volcanique dans lextinction de masse qui a touché cette période de lhistoire de la Terre.
Dans la province magmatique de lAtlantique central (CAMP), qui sétend sur plusieurs millions de km2 de lAmérique du Nord à lAmérique du Sud et de lEurope à lAfrique, les géologues ont trouvé des vastes domaines de coulées de basalte. Celles-ci représentent des remontées de magma le long de fissures verticales profondes, qui sétendent sur plusieurs centaines de kilomètres. « Nous avons alors posé lhypothèse que ces basaltes sont antérieurs ou contemporains de lextinction de masse de la limite Trias-Jurassique, et nous avons vérifié cela grâce à nos techniques de datation précise », explique Joshua Davies, chercheur au Département des sciences de la Terre de la Faculté des sciences de lUniversité de Genève (UNIGE).
Les basaltes renferment le minéral zircon en quantités minuscules, contenant lui-même de luranium. Celui-ci a la particularité de se désintégrer en plomb au fil du temps à une vitesse connue. « Cest pourquoi, en mesurant les concentrations relatives duranium et de plomb, il nous est possible de dater la cristallisation des minéraux dans une roche à 30000 ans près, ce qui est extrêmement précis pour des périodes de plus de 200 millions dannées », ajoute Urs Schaltegger, professeur au Département des sciences de la Terre de la Faculté des sciences de lUNIGE.
Effectuer ces datations précises est un exercice compliqué que seuls quatre laboratoires ont les moyens de faire avec précision, dont celui de lUNIGE. Les géologues se sont penchés plus particulièrement sur la mise en place de basaltes présents dans le bassin sédimentaire dAmazonie au Brésil, un important réservoir de charbon et de pétrole. Et effectivement, les résultats de leurs datations confirment que lâge de ces basaltes corrèle avec la période dextinction de masse à la limite Trias-Jurassique. Ceci permet de lier cette activité volcanique à la libération thermique dimmenses volumes de CO2 provenant du charbon et des hydrocarbures, ainsi quà la disparition des espèces vivantes à cette période.
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Journal
Nature Communications