Des chercheurs bordelais viennent de découvrir un nouveau mécanisme permettant le stockage de linformation dans les synapses ainsi quun moyen de contrôler ce stockage. Une découverte qui lève un peu plus le voile sur le grand mystère des mécanismes moléculaires de la mémoire ainsi que sur les processus dapprentissage. Ces travaux, menés principalement par des chercheurs de lInstitut interdisciplinaire des neurosciences (CNRS/Université de Bordeaux) et du Bordeaux Imaging Center (CNRS/Université de Bordeaux/Inserm) [1], sont publiés le 13 septembre 2017 dans Nature.
Les neurones communiquent entre eux par lintermédiaire de plus dun million de milliards de synapses, de toutes petites structures de la taille dun dixième de cheveu, au fonctionnement extrêmement complexe. Le processus de plasticité synaptique, cest-à-dire le fait que la synapse adapte son fonctionnement à lactivité neuronale, a été découvert il y a presque 50 ans et a conduit la communauté scientifique à le proposer comme un élément fonctionnel primordial de la mémorisation et de lapprentissage.
Les récepteurs de neurotransmetteurs présents au niveau des synapses jouent un rôle clé dans la diffusion des messages nerveux. Il y a quelques années, léquipe de chercheurs bordelais avait découvert que les récepteurs de neurotransmetteurs nétaient pas immobiles comme on le pensait, mais au contraire en agitation permanente. Ils avaient alors suggéré que le contrôle de cette agitation par lactivité neuronale pouvait être capable de moduler lefficacité de la transmission synaptique en contrôlant le nombre de récepteurs présents à un instant donné dans une synapse.
Dans ces nouveaux travaux, deux équipes sont allées plus loin dans la compréhension des mécanismes fondamentaux de stockage de linformation dans le cerveau. Les chercheurs ont combiné des techniques de chimie, délectrophysiologie et dimagerie à haute résolution pour mettre au point une méthode inédite dimmobilisation des récepteurs au niveau des synapses. Grâce à cette méthode, les mouvements des récepteurs sont stoppés, ce qui permet détudier limpact de leur immobilisation sur lactivité cérébrale et les capacités dapprentissage. Ils ont ainsi démontré que le mouvement des récepteurs est indispensable aux processus de plasticité synaptique en réponse à une activité neuronale intense.
Les chercheurs ont ensuite exploré le rôle direct de la plasticité des synapses dans lapprentissage. En apprenant à des souris à reconnaitre un environnement particulier, ils ont pu mettre en évidence que le gel du mouvement des récepteurs permet de bloquer lacquisition de cette forme de mémoire, démontrant ainsi limplication de la plasticité synaptique dans ce processus.
Cette nouvelle découverte ouvre des perspectives pour le contrôle de la mémoire. Le protocole de mémorisation testé ici active une zone particulière du cerveau : lhippocampe. Les chercheurs souhaitent maintenant déterminer si le mécanisme quils ont découvert peut être généralisé à dautres formes dapprentissage et donc à dautres zones du cerveau. Dun point de vue plus technologique, de nouvelles méthodes dimmobilisation des récepteurs réversibles et sensibles à la lumière vont pouvoir être développées afin de mieux contrôler le processus.
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[1] En collaboration avec un chercheur de lInstitut des maladies neurodégénératives (CNRS/Université de Bordeaux).
Journal
Nature