Les ondes terahertz sont des gammes de fréquence de lumière qui se situent entre le rayonnement infrarouge (utilisé entre autre pour la vision nocturne) et les ondes gigahertz (utilisées par exemple pour les connexions wifi). Celles-ci permettent de détecter des matériaux inaccessibles avec dautres fréquences, mais leur utilisation est toutefois fortement limitée par labsence de dispositifs et de matériaux appropriés pour les contrôler. Des chercheurs de lUniversité de Genève (UNIGE), en collaboration avec lécole polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ) et deux groupes espagnols, ont mis au point une technique fondée sur lutilisation du graphène qui permet un contrôle potentiellement très rapide de lintensité et de la polarité des rayons terahertz. Cette découverte, à lire dans la revue Nature Communications, permet denvisager des applications pratiques de lusage des ondes terahertz, tant au niveau de limagerie que de celui de la communication.
Le graphène est une couche monoatomique datomes de carbone qui forment un réseau en nid dabeille et que lon trouve en particulier dans le graphite, la matière qui constitue les mines de crayon. Léquipe dAlexey Kuzmenko, du Département de physique de la matière quantique de la Faculté des sciences de lUNIGE, travaille depuis plusieurs années sur ses propriétés physiques. « Linteraction entre la lumière terahertz et les électrons du graphène est très forte et nous avons donc supposé quil devait être possible dutiliser le graphène pour contrôler les ondes terahertz », explique le chercheur.
Dans le cadre du projet européen Graphene Flagship, les scientifiques ont ainsi créé un transistor à base de graphène adapté pour les ondes terahertz. « En combinant le champ électrique, qui permet de contrôler le nombre délectrons du graphène et donc de laisser passer plus ou moins de lumière, et le champ magnétique qui courbe les orbites électroniques, nous avons été en mesure de contrôler non seulement lintensité des ondes terahertz que nous voulions laisser passer, mais aussi leur polarisation. Il est rare que des effets purement électriques soient utilisés dans le contrôle de phénomènes magnétiques », développe Jean-Marie Poumirol, chercheur à lUNIGE et premier auteur de létude. Ainsi, les scientifiques sont dorénavant en mesure deffectuer ce contrôle sur toute la gamme de fréquences des terahertz.
Les applications pratiques des rayonnements terahertz
Aujourdhui, les chercheurs de lUNIGE travaillent sur les applications pratiques de leur prototype et des nouvelles possibilités quil offre pour le contrôle des ondes terahertz. Ils ont pour projet de le rendre industriellement compétitif dans les quelques années à venir. Cette innovation couvre deux champs dapplications principaux. Le premier concerne la communication. « Grâce à notre plaque de graphène associée aux ondes terahertz, il nous serait possible denvoyer des informations qui permettent une communication 10 à 100 fois plus rapide que le wifi ou les ondes radio, tout en assurant une transmission sécurisée, pour autant que cela soit sur une courte distance », précise Jean-Marie Poumirol. Un avantage indéniable pour la télécommunication. Le second domaine dapplications concerne limagerie. Nétant pas ionisantes, les ondes terahertz naltèrent pas lADN, un atout pour la médecine, la biologie et la pharmacie. Le contrôle ultrarapide de la polarisation circulaire des ondes terahertz permettra notamment de distinguer les molécules biologiques ayant une symétrie différente (gauche et droite), propriété très importante pour les applications médicales. Elles sont également potentiellement très utiles pour la sécurité intérieure: « Les ondes terahertz sont arrêtées par le métal et sont sensibles au plastique et aux matières organiques. Grâce à elles, il est donc possible de détecter de manière beaucoup plus efficace les armes, les drogues et les explosifs que pourraient transporter une personne, ce qui serait idéal dans les contrôles des aéroports », conclut Alexey Kuzmenko.
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Journal
Nature Communications