image: Researchers might be studying species that fare relatively better in such environments than the average species on Earth because one can only study selection in species that survive in impacted environments. view more
Credit: Andrew Hendry
Les perturbations de lenvironnement attribuables à lactivité humaine sont-elles à lorigine de changements évolutifs chez les animaux et les plantes? Les résultats dune nouvelle étude réalisée par des chercheurs de lUniversité McGill indiquent quen moyenne, ces perturbations ne semblent pas accélérer le processus de sélection naturelle. Si cette découverte peut sembler rassurante, elle pourrait sexpliquer par le nombre limité despèces pour lesquelles des données sont disponibles.
De nombreuses études ont démontré que lactivité humaine accélère le rythme auquel évoluent certaines espèces : ainsi, les poissons de certaines espèces deviennent souvent plus petits au fil du temps après que les hommes en aient pêché, de façon sélective, les plus gros représentants; les mauvaises herbes et les insectes ravageurs deviennent résistants aux pesticides, et les agents pathogènes sont de plus en plus résistants aux antibiotiques.
Une évolution rapide en réponse à lactivité humaine pourrait être attribuable à un renforcement de la sélection naturelle, un facteur déterminant du rythme de lévolution. Afin de mieux comprendre limportance de ce phénomène, Vincent Fugère et Andrew Hendry, du Département de biologie de lUniversité McGill, ont passé en revue des milliers darticles scientifiques sur le sujet. Ils en ont retenu 40, dans lesquels les auteurs estimaient la « force de sélection » la mesure dans laquelle un trait en particulier est lié à la survie ou à la réussite de la reproduction (valeur adaptative du phénotype) tant dans les milieux perturbés par lactivité humaine que dans les milieux naturels. Ces articles portaient notamment sur une espèce de mauvaise herbe observée dans des prairies arrosées ou non dherbicides ainsi que sur une population de requins avant et après la construction dune station balnéaire ayant altéré lhabitat de la mangrove environnante.
Après avoir passé en revue les 40 études retenues, les auteurs ont compilé des estimations portant sur 102 traits chez 37 espèces différentes. Ils ont ensuite eu recours à des modèles statistiques afin de déterminer si, en général, la sélection était plus forte dans les milieux perturbés par lactivité humaine. Bien que certaines perturbations sétaient traduites par une très forte sélection causée par lactivité humaine, dautres avaient affaibli le processus de sélection. En moyenne, aucune incidence nette na été observée.
« Nous ne prétendons pas que les perturbations humaines ninfluent pas sur lévolution; en fait, je suis persuadé du contraire », affirme Vincent Fugère, auteur principal de la nouvelle étude publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.
Cette étude, qui surprendra sans doute certains biologistes évolutionnistes, permet plutôt de constater combien il est difficile de mesurer lincidence de lactivité humaine sur lévolution de la biosphère.
« Les biologistes savent que de nombreuses espèces qui peinent à sadapter à des milieux perturbés par lactivité humaine finissent par disparaître, phénomène appelé "extinction locale" », souligne Vincent Fugère. « Les taux dextinction locale nont jamais été si élevés; or, aucune des espèces figurant dans notre base de données nétait disparue localement. Notre principale conclusion sexplique en partie par le fait que les chercheurs étudient peut-être des espèces qui se débrouillent relativement mieux dans des milieux perturbés que la plupart des espèces sur Terre puisquil est impossible détudier la sélection sil y a eu une extinction locale. »
Vincent Fugère et Andrew Hendry espèrent que leurs résultats orienteront dautres études sur la sélection naturelle et permettront de mieux comprendre lincidence quont les perturbations humaines sur lévolution.
###
Cette étude a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
Larticle « Human influences on the strength of phenotypic selection », par Vincent Fugère et Andrew P. Hendry, a été publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.
Journal
Proceedings of the National Academy of Sciences