image: Bacteriophages are shown on the Escherichia coli bacterium. view more
Credit: © Institut Pasteur
Dans un article paru dans PLoS Genetics le 5 juillet, des chercheurs de lInstitut Pasteur et de lUniversité Catholique de Louvain (Belgique) décryptent pour la première fois les mécanismes génétiques et métaboliques qui sous-tendent laction dun bactériophage connu pour son potentiel thérapeutique. Face à linquiétante augmentation des résistances bactériennes aux antibiotiques et à la difficulté de concevoir de nouvelles molécules efficaces, la phagothérapie, qui repose sur lutilisation de ces virus bactériens, connaît depuis quelques années un regain dintérêt de la communauté scientifique. Cette découverte contribue ainsi aux efforts entrepris pour permettre le développement de ce traitement, aujourdhui délaissé dans le monde occidental.
La phagothérapie est une approche médicale utilisée pour traiter les maladies infectieuses dorigine bactérienne, sappuyant sur les capacités naturelles de certains virus, appelés bactériophages, à tuer les bactéries quils reconnaissent spécifiquement. La phagothérapie fût proposée il y a presquun siècle à lInstitut Pasteur par le chercheur franco-canadien Félix dHerelle. Bien quinitialement utilisée dans le monde entier, à partir des années 1940 elle connut un fort essor dans les pays de lEst, alors quelle fût progressivement abandonnée dans les pays occidentaux au profit des antibiotiques, jugés plus prometteurs. Aujourdhui, la nature virale de ce traitement anti-bactérien et labsence de connaissances précises sur le mode daction des bactériophages constituent des obstacles au recours à la phagothérapie dans un cadre médical.
Pourtant, face à laugmentation des résistances bactériennes aux antibiotiques et à linquiétante perspective des impasses thérapeutiques qui laccompagne, des scientifiques se tournent à nouveau vers la piste des bactériophages. Cest le cas de chercheurs de lInstitut Pasteur, menés par Laurent Debarbieux , et de lUniversité Catholique de Louvain (Belgique), menés par Rob Lavigne. Ils publient aujourdhui une étude attendue décryptant au niveau moléculaire les mécanismes daction originaux utilisés par un bactériophage, connu pour son potentiel thérapeutique, infectant la bactérie pathogène opportuniste Pseudomonas aeruginosa.
Les travaux des scientifiques révèlent que toute la stratégie dinfection du bactériophage, depuis le piratage de la cellule jusquà son propre programme de multiplication, repose sur le métabolisme de lARN, un mécanisme fondamental au cur du processus de production de la matière biologique.
Les chercheurs ont en effet dabord montré quau cours de son cycle infectieux, le phage était capable de déstabiliser fortement la cellule, en dégradant précocement les ARN quelle produit. A linverse, la synthèse de lARN du bactériophage, elle, est particulièrement active, traduisant une forte activité liée à sa propre multiplication.
En outre, les chercheurs ont également montré que le bactériophage faisait appel à des mécanismes de contrôle impliquant des fragments dARN appelés « petits ARN » et « ARN antisens », pour orchestrer finement les différentes étapes de production des nouvelles particules virales.
Ces travaux soulignent lintérêt que peut présenter la caractérisation de bactériophages aux propriétés thérapeutiques, à la fois en tant que source de nouvelles découvertes fondamentales, mais également pour mieux comprendre le mode daction des bactériophages dans leur activité antibactérienne. « Ces travaux devraient inciter à la caractérisation dautres bactériophages à potentiel thérapeutique, commente Laurent Debarbieux. Nous espérons quils contribueront, à terme, à rendre de nouveau possible en France lutilisation de ces virus à des fins médicales ».
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Journal
PLOS Genetics