Si lon penche une plante, celle-ci corrigera sa croissance pour pousser à nouveau à la verticale. Mais comment la-t-elle senti ? Grâce à des « inclinomètres » cellulaires : des cellules remplies de grains damidon microscopiques, les statolithes. La position du tas de grains dans les cellules indique le bas et guide ainsi lélongation de la plante dans la direction qui lui permet de revenir à la verticalité, en modifiant la distribution dune hormone de croissance végétale.
Le secret des plantes réside dans leur extrême sensibilité à la gravité, même pour les plus petites inclinaisons. Or, a priori, un empilement de grains constitue un piètre inclinomètre : frottements et enchevêtrements limitent normalement lécoulement des grains, ce qui rend le système inopérant en dessous dun angle critique Sauf chez les plantes, où les statolithes surprennent par leur précision.
Des chercheurs de lInstitut universitaire des systèmes thermiques industriels (CNRS/Aix Marseille Université) et du laboratoire de Physique et physiologie intégratives de l'arbre en environnement fluctuant (Inra/Université Clermont-Auvergne) se sont donc associés pour résoudre ce paradoxe. Ils ont tout dabord observé directement le mouvement des statolithes en réponse à une inclinaison et ont découvert que ces grains ne se comportent pas comme un milieu granulaire classique : ils se déplacent et coulent dans la cellule quel que soit langle quon lui impose. Comme un liquide, la surface du tas de statolithes finit toujours par revenir vers lhorizontale. Mais comment les cellules font elles pour « fluidifier » le tas de grain ?
Pour élucider lorigine de ce comportement, les chercheurs ont poursuivi leur étude en mettant au point un système analogue aux statolithes des cellules végétales, constitué de microbilles dans des cellules artificielles de même dimension. La comparaison entre les deux systèmes a permis de conclure que la fluidité globale des statolithes découle de leur agitation individuelle : grâce à ses moteurs moléculaires, la cellule brasse activement les grains, ce qui leur permet de ne pas rester bloqués les uns sur les autres et confère au système, sur le temps long, des propriétés proches de celles dun liquide. Ce comportement est essentiel pour la plante, car il lui permet de ne pas avoir de seuil de sensation et de percevoir même les petites inclinaisons, sans être perturbée non plus par les agitations rapides liées au vent.
Ces travaux permettent de comprendre lorigine de la grande sensibilité des plantes à la gravité en élucidant en partie la dynamique des statolithes. Sils doivent encore être complétés, notamment pour comprendre comment la position des statolithes est détectée, ils ouvrent déjà la voie à des applications industrielles bioinspirées comme le développement dinclinomètres miniatures robustes, offrant une alternative aux gyroscopes ou accéléromètres utilisés aujourdhui.
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Journal
Proceedings of the National Academy of Sciences