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Journée internationale des maladies rares : anémie falciforme et COVID-19, un cocktail risqué

Peer-Reviewed Publication

University of Montreal Hospital Research Centre (CRCHUM)

Dre Stéphanie Forté,  chercheuse au CRCHUM et professeure à l'Université de Montréal

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Credit: CHUM

La chercheuse Stéphanie Forté et des collègues du Canada et du Brésil ont montré comment les personnes atteintes d’anémie falciforme ou du trait falciforme ont plus de risque de décéder de la COVID-19 que la population générale.

Les gens atteints d’anémie falciforme, mais aussi ceux porteurs du trait falciforme, généralement considéré bénin, présentent un taux de mortalité et d’hospitalisation plus élevé s’ils contractent la COVID-19, suggère une nouvelle étude canado-brésilienne.

Dirigée par la Dre Stéphanie Forté, professeure adjointe de médecine à l’Université de Montréal, la méta-analyse est publiée dans la revue en libre accès eClinicalMedicine, partie intégrante de The Lancet Discovery Science.

« On estime qu’entre 1500 et 1800 personnes sont atteintes d’anémie falciforme au Québec. Bien qu’on en parle peu, c’est la maladie rare la plus fréquente au Canada », indique la Dre Forté, hématologue au CHUM et chercheuse au CRCHUM.

Au pays, cette maladie chronique héréditaire touche près de 6000 personnes. La plupart sont originaires de l’Afrique, des Caraïbes, du Moyen-Orient ou de l’Inde.

Cette maladie chronique se caractérise par des globules rouges rigides qui entraînent le blocage de vaisseaux sanguins. Les muscles et les organes sont alors privés d’oxygène, ce qui cause de fortes douleurs récurrentes aux personnes atteintes ou des séquelles aux différents organes.

Aujourd’hui, aucune thérapie n’est approuvée au Canada spécifiquement pour la maladie falciforme. Proposée en traitement préventif, l’hydroxyurée est un médicament de chimiothérapie par voie orale, utilisé de façon sécuritaire depuis plus de 40 ans, qui réduit le nombre de crises, protège les organes et prolonge la survie. L’hydroxyurée rend les globules rouges plus ronds et plus souples en augmentant une forme protectrice d’hémoglobine, l’hémoglobine F. Cette hémoglobine est également appelée hémoglobine fœtale, car les nouveau-nés la possèdent.

Pour pallier les crises douloureuses, les patients et les patientes ont recours à des médicaments antidouleurs, des visites à l’urgence et des hospitalisations. Certains ont besoin de renouveler régulièrement leurs globules rouges par le biais de transfusions sanguines.

« Chez les personnes porteuses du trait de l’anémie falciforme, un seul des deux gènes reçus de leurs parents est altéré et la maladie ne se développe pas. Ce sont pourtant des personnes à risque à surveiller et à prioriser lors d’actions de santé publique comme la vaccination par exemple », dit la Dre Forté.

Ces personnes sont aussi plus susceptibles que la population générale à des complications rénales à la suite d’une infection par la COVID-19.

L’appel du Brésil

L’idée de documenter et d’évaluer l’impact de l’infection par le SARS-CoV-2 sur cette population n’est pas née par hasard.

Lors d’une autre pandémie, celle de la grippe H1N1, les équipes médicales avaient déjà constaté mondialement que les personnes atteintes d’anémie falciforme avaient plus de risque de développer un syndrome thoracique aigu ou d’être admises en unité de soins intensifs.

En 2020, alors en fellowship à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil (France), la Dre Forté assiste à la mise en place du registre français de personnes atteintes d’anémie falciforme et de la COVID-19.

« À mon retour au Québec, en pleine pandémie, j’ai lancé notre propre registre québécois avec l’équipe du Dr Thai Hoa Tran de l’hôpital Sainte-Justine. Tous les centres québécois de maladie falciforme y ont collaboré, dit la Dre Forté. Et, c’est l’appel d’Isabella Michelon, une étudiante en médecine brésilienne à l’Université catholique de Pelotas, qui a lancé cette nouvelle étude internationale. Elle en est d’ailleurs la première auteure. »

Pour un de ses cours en épidémiologie, sa collègue brésilienne a contacté les équipes internationales qui faisaient de la recherche sur l’anémie falciforme et la COVID-19. L’équipe de la Dre Forté a répondu à son appel.

Un travail de grande ampleur démarre alors pour collecter et analyser les 22 études qui sont incluses dans leur méta-analyse et englobent près de 1900 personnes atteintes d’anémie falciforme, environ 8700 personnes ayant le trait de l’anémie falciforme et plus de 1,65 million d’autres bien portantes.

Une expertise reconnue

Au CHUM, la Dre Forté est la responsable médicale du centre intégré des maladies héréditaires du CHUM (SANGRE). Le centre a été récemment sélectionné par l’Association américaine d’hématologie pour bénéficier d’un mentorat et d’un accompagnement pendant deux ans dans le cadre des Sickle Cell Disease Centers Workshops.

« C’est une très belle reconnaissance. En faisant partie de ce réseau d’excellence, cela nous permettra notamment de comparer notre performance à d’autres établissements et d’avoir accès à des ateliers sur les meilleures pratiques dans notre domaine. Notre priorité au CHUM est de travailler à mieux soulager nos patients souffrant de douleurs sévères », explique la Dre Forté.

Des patients qu’elle remercie pour leur implication dans le registre, mais aussi pour leur participation à la biobanque de sang, qui comprend déjà 300 échantillons et qui a été mise en place en collaboration avec Guillaume Lettre, chercheur à l’Institut de cardiologie de Montréal et professeur à l’Université de Montréal.

Mentor de la clinicienne chercheuse, Guillaume Lettre a découvert en 2006 que la sévérité de la maladie était liée à des variations dans le gène BCL11A. En effet BCL11A joue un rôle dans l’inhibition de l’expression de l’hémoglobine fœtale après la naissance. Son travail de recherche fondamentale a mené au premier traitement expérimental, développé par une entreprise pharmaceutique américaine, pour inactiver le gène BCL11A.

L’approbation récente par la Food and Drug Administration aux États-Unis de cette thérapie génique basée sur CRISPR-Cas9 — un ciseau moléculaire qui permet d’inactiver BCL11A — représente, malgré les coûts élevés du traitement, une percée majeure pour les personnes atteintes de la maladie.

 

Rédaction : Bruno Geoffroy

 

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À propos de l’étude

L’article « COVID-19 outcomes in patients with sickle cell disease and sickle cell trait compared with individuals without sickle cell disease or trait: a systematic review and meta-analysis », par Isabella Michelon sous la supervision de la Dre Stéphanie Forté et de ses collègues, a été publié en ligne le 8 décembre 2023 dans la revue eClinicalMedicine.

À propos du Centre de recherche du CHUM (CRCHUM) 

Le Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CRCHUM) est l’un des principaux centres de recherche hospitaliers en Amérique du Nord. Sa mission est d’améliorer la santé des adultes grâce à un continuum de recherche couvrant des disciplines telles que la science fondamentale, la recherche clinique et la santé des populations. Plus de 2150 personnes travaillent au CRCHUM, dont près de 500 chercheuses et chercheurs, et près de 650 étudiantes, étudiants et stagiaires postdoctoraux. crchum.com

À propos de l’Université de Montréal 

Montréalaise par ses racines, internationale par vocation, l’Université de Montréal compte parmi les plus grandes universités dans le monde et notamment au sein de la francophonie. Elle a été fondée en 1878, et compte aujourd’hui 13 facultés et écoles. Elle forme avec ses deux écoles affiliées, HEC Montréal et Polytechnique Montréal, le premier pôle d’enseignement supérieur et de recherche du Québec et l’un des plus importants en Amérique du Nord. L’Université de Montréal réunit 2 300 professeurs et chercheurs et accueille plus de 70 000 étudiants. umontreal.ca 


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