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Traiter le cancer du foie avec des microrobots pilotés par un champ magnétique

Peer-Reviewed Publication

University of Montreal Hospital Research Centre (CRCHUM)

Le Dr Gilles Soulez, chercheur au CRCHUM et professeur à l'Université de Montréal, en compagnie de Ning Li, postdoctorant dans le laboratoire du Dr Soulez

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Credit: CHUM

Montréal, 14 février 2024 — Des chercheurs canadiens dirigés par le radiologue montréalais Gilles Soulez ont mis au point une approche inédite pour traiter les tumeurs hépatiques à l’aide de microrobots magnétiques guidés dans un appareil d’IRM.

L’idée d’injecter des robots microscopiques dans la circulation sanguine pour soigner le corps humain n’est pas nouvelle. Ce n’est pas non plus de la science-fiction.

Guidés à l’aide d’un champ magnétique externe, des robots miniatures et biocompatibles, formés de nanoparticules aimantables d’oxyde de fer, peuvent théoriquement aller livrer un traitement médical de façon très ciblée.

Jusqu’à présent, un obstacle technique perdurait : la force de la gravité de ces microrobots dépasse celle de la force magnétique, ce qui limite leur guidage quand la tumeur est située plus haut que le site d’injection.

Bien que le champ magnétique de l’IRM est élevé, les gradients magnétiques, utilisés pour leur navigation et aussi pour générer des images IRM, sont plus faibles.

« Pour résoudre ce problème, nous avons développé un algorithme qui détermine dans quelle position le corps du patient doit se trouver dans une IRM clinique pour tirer avantage de la gravité et la combiner avec la force de navigation magnétique », explique le Dr Gilles Soulez, chercheur au Centre de recherche du CHUM et directeur du Département de radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire de l’Université de Montréal.

« Cet effet conjugué facilite le déplacement des microrobots vers les branches artérielles qui vont nourrir la tumeur », dit-il. « En faisant varier la direction du champ magnétique, nous pouvons les guider avec précision vers les sites à traiter et préserver ainsi les cellules saines. »

Vers plus de précision

Publiée dans la revue Science Robotics, cette preuve de concept pourrait modifier les approches de radiologie interventionnelle utilisées pour traiter les cancers du foie.

Le plus courant d’entre eux, le carcinome hépatocellulaire, est responsable de 700 000 morts par an au niveau mondial, et est souvent traité aujourd’hui par chimioembolisation transartérielle.

Requérant du personnel hautement qualifié, ce traitement invasif consiste à administrer la chimiothérapie directement dans l’artère nourrissant la tumeur hépatique et à en bloquer l’apport en sang à l’aide de microcathéters guidés par rayon X.

« Notre approche de navigation par résonance magnétique pourrait se faire à l’aide d’un cathéter implantable comme ceux utilisés en chimiothérapie », dit le Dr Soulez. « L’autre avantage est que les tumeurs sont mieux visualisées en IRM que sous les rayons X. »

Pour cette étude, l’équipe du Dr Gilles Soulez a collaboré avec celles de Sylvain Martel (Polytechnique Montréal) et de Urs O. Häfeli (University of British Columbia). Le premier auteur de l’étude, Ning Li, est postdoctorant dans le laboratoire du Dr Soulez.

Grâce à la mise au point d’un injecteur pour les microrobots compatible avec l’IRM, les scientifiques ont pu assembler à la demande des « trains de particules », des agrégats de microrobots magnétisables. Dotés d’une plus grande force magnétique, ils sont plus facilement pilotables et repérables sur les images fournies par l’appareil d’IRM.

L’équipe peut ainsi s’assurer non seulement que le train va dans la bonne direction, mais aussi que la dose de traitement est adéquate. Car, à terme, chaque microrobot portera une portion du traitement à livrer. Connaître leur nombre est donc essentiel pour les radiologistes.

Un bon sens de l’orientation

« Nous avons fait des essais sur douze porcs afin de nous rapprocher au mieux des conditions anatomiques des patients. Cela s’est avéré concluant : les microrobots naviguaient de préférence dans les branches de l’artère hépatique qui étaient ciblées par l’algorithme et parvenaient à destination », dit le Dr Soulez.

Son équipe s’est assurée que la localisation de la tumeur dans les différentes parties du foie n’influençait pas l’efficacité d’une telle approche.

« Grâce à un atlas anatomique de foies humains, nous avons pu simuler le pilotage de microrobots sur 19 patients traités par chimioembolisation transartérielle », indique-t-il. « Ils avaient au total une trentaine de tumeurs placées à des endroits différents de leur foie. Dans plus de 95 % des cas, la localisation de la tumeur était compatible avec l’algorithme de navigation pour atteindre la cible tumorale. »

Malgré cette avancée scientifique, l’application clinique de cette technologie n’est pas pour demain.

« Il faut d’abord que nous optimisions, grâce à l’intelligence artificielle, la navigation en temps réel des microrobots en détectant leur localisation dans le foie et aussi la survenue de blocages des branches de l’artère hépatique nourrissant la tumeur », précise le Dr Soulez.

Les scientifiques devront aussi modéliser le flux sanguin, le positionnement du patient et la direction du champ magnétique à l’aide de logiciels simulant les écoulements des fluides dans les vaisseaux. Cela permettra d’évaluer l’impact de ces paramètres sur le transport des microrobots jusqu’à la tumeur cible et ainsi améliorer la précision de l’approche.

Selon la Société canadienne du cancer, 4 700 Canadiens ont reçu un diagnostic de cancer du foie ou des canaux biliaires intrahépatiques en 2023.

 

Rédaction : Bruno Geoffroy

 

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À propos de l’étude

L’article « Human-scale navigation of magnetic microrobots in hepatic arteries », par Ning Li sous la supervision de Gilles Soulez et de ses collègues, a été publié en ligne le 14 février 2024 dans la revue Science Robotics. Le financement de l’étude a été assuré par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada, le Fonds de Recherche du Québec-Santé, la Fondation de l’association des radiologistes du Québec, la National Natural Science Foundation of China, le Shanghaï High-end Foreign Expert Project et le Shanghaï Rising-Star Program.

 

À propos du Centre de recherche du CHUM (CRCHUM)

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